Les anciens élèves

Fête du 8 décembre 2020
Bulletins des anciens
Quelques nouvelles et réflexions

Une bien triste nouvelle et deux récentes réflexions.

Alain Goyet nous a quitté le 31 juillet 2020. Il y a tant d’années que nous le rencontrions fidèlement lors de la journée des Anciens Elèves ou à l’occasion de nos sorties amicales ! Jean Varnet a pu représenter ses amis de l’IND aux funérailles.

Alain, nous n’oublions pas les moments heureux passés ensemble à l’IND chez les Scouts, lors de nos sorties et réunions….

Dans les quelques lignes qui suivent, deux anciens nous font partager leur Espérance :

« On oublie, hélas, plus vite les moments heureux et paisibles ! Par bonheur nous avons les annales de l’IND, des mémoires vivantes, des repères annuels, même si aujourd’hui les dates de nos rencontres sont devenues mobiles ! Les 101 deviendront 101 ans (davantage ne le souhaitons pas pour nous !). Et puis Noël est une date fixe, et un rendez-vous important pour beaucoup, même non chrétiens, voire ignorants du sens de cette fête. Alors gardons l’espérance, chassons autant que faire se peut les visions sombres ou pessimistes ! Il est vrai que ceux qui ont aujourd’hui l’âge que nous avions quand nous allions quitter l’IND vivent un temps d’incertitude, que la mise en place du “Parcoursup” n’est pas fait pour rendre plus serein, mais enfin, ils sont jeunes ! Ne les désespérons pas par des réflexions maussades ou désabusées ! ».

En écho à ces réflexions, un autre message :

Cette année Noël sera disons, différent. Que cependant ce ne soit pas un Noël de tristesse et de désespérance, mais au contraire un Noël d'espoir et de plus grande fraternité, qui nous rende plus lucides et nous rapproche davantage des autres. C'est celui que je vous souhaite.

4 décembre 2020

L'IND dans les années 50

Je viens de retrouver les « Ephémérides » de l’année 1954 – 1955, ce petit livre imprimé que l’on nous remettait solennellement en début d’année. Cela m’a rappelé tout un tas de souvenirs.

J’ai fréquenté l’IND de 1952 à 1959. Les deux premières années comme externe, ensuite comme interne. La guerre était encore proche et dans nos familles, il y avait souvent un père, un oncle ou un cousin qui avait été prisonnier, maquisard ou combattant. Les orphelins de    guerre et autres pupilles étaient assez nombreux.

L’effectif de l’établissement oscillait entre 300 et 350 élèves, petit collège compris. Une grosse moitié était pensionnaire.

Il y avait trois divisions, la 1ere division des grands (1ere, 2eme et 3eme) surveillés par le père TROUILLER, puis par Monsieur MONTAGNE, ancien parachutiste, retour d’Algérie et fumeur invétéré. La 2eme division des petits internes (4eme, 5eme et 6eme) surveillés par le père Claude BRUN et la 3eme division des petits externes surveillés par le père WEIBEL, dit Narcisse. Les surveillants étaient logés dans les dortoirs de leur division sauf Narcisse qui avait sa chambre dans le couloir des professeurs.

Au début des années 50, les internes ne sortaient qu’une fois par mois lors de la sortie générale.

Le dimanche, nos parents pouvaient venir nous chercher entre 9h15 et 18h45.Vers le milieu des années 50, le régime s’assouplit et tout d’abord une sortie intermédiaire réservée aux bons élèves fut instituée. Elle fut généralisée par la suite. A partir de 1957, la sortie tous les samedis à 16h30 fut autorisée. Lorsque j’ai quitté l’établissement, les internes qui restaient le week-end devaient payer un supplément.

La journée ordinaire des internes commençait à 6h15 pour se terminer entre 20h et 21h selon les divisions, le   tout rythmé par la cloche que le sonneur s’évertuait de faire retentir à l’heure. J’ai été sonneur pendant 2 ans et  ma hantise était d’être interrogé par le professeur au moment où il fallait sortir pour sonner. Cela est arrivé plusieurs fois.

Trois événements importants dans la vie de l’établissement :

  • Le 8 décembre Immaculée Conception et Fête de l’établissement.
  • Le 1er mai, journée des anciens. Nous étions très étonnés de voir tous ces messieurs grisonnants en costume cravate se comporter comme des gamins en se racontant leurs Ils venaient garer leurs voitures sur le stade et nous venions les contempler.
  • Autre événement d’importance, la distribution des prix, dernier jour de l’année scolaire. Elle se déroulait généralement sous l’un des préaux où une estrade était dressée devant des bancs et chaises nous accueillant ainsi que nos familles. Elle était présidée par l’évêque ou son vicaire général et chaque professeur venait lire le palmarès de sa classe devant des élèves pressés de partir en vacances et des parents ravis. Chaque élève cité montait sur l’estrade recevoir son prix (en général des livres). Sitôt la cérémonie terminée, encombrement dans les dortoirs pour récupérer valises, draps et couvertures, car rien ne devait rester pendant les

La vie de l’établissement était fortement marquée par les activités religieuses, prières au début des classes, cours d’instruction religieuse obligatoire, messe obligatoire une fois par semaine, nombreuses fêtes carillonnées avec messe chantée, salut etc. En début d’année, retraite obligatoire. En terminale, retraite de fin d’étude. Pour la communion solennelle, retraite. Pendant la semaine sainte, retraite pascale. Les vacances de Paques ne commençaient que le Vendredi saint après le chemin de croix. Plusieurs micro-chapelles disséminées dans l’établissement permettaient à tous les prêtres de dire leur messe quotidienne servie par un interne de semaine.

L’IND années 50, c’était ce bâtiment en U encadrant les cours au milieu desquelles s’élevaient « les petits

Chalets.

En pénétrant dans le hall d’entrée, nous étions accueillis par Yves, breton à lunettes, bossu et pied bot, toujours en blouse, menuisier de métier qui faisait tous les travaux d’entretien des bâtiments assisté d’un prisonnier allemand surnommé « Dents Blanches » (il rentra en Allemagne en 1954 si j’ai bonne mémoire). A eux deux assistés du père Feugier, ils avaient creusé et construit la piscine. C’est lui qui réglait les admissions au parloir dans lequel, parfois, nos parents venaient nous embrasser. Quelquefois, le jeudi après-midi, nos mères arrivées en train ou en autobus venaient nous chercher pour nous habiller et nous faisions rapidement le tour des marchands de chaussures et des magasins de vêtements. Souvent, nous retrouvions dans ces magasins un camarade occupé à la même tache. La remontée de l’avenue de Chabeuil au pas de course concluait généralement la journée. Le retour à l’IND devait avoir lieu pour l’étude de 17 h.

Une grande porte permet d’accéder à l’escalier et au couloir, ce long couloir dont le carrelage n’a pas changé. Sur la droite, le préau et les études des 1ere et 2eme division, séparées par un petit foyer. Sous le préau, le père Trouiller affichait le journal du jour, que nous venions lire avec attention pour suivre la guerre d’Indochine et la situation du camp retranché de Dien-Bien-Phu, puis les événements d’Algérie. L’établissement accueillait plusieurs enfants de militaires. Je me souviens de mon voisin de classe en 5eme (j’ai oublié son nom) qui était fils d’officier. Un jour, il fut absent et au cours de la prière en début de classe, on nous fit prier pour lui et son père qui venait d’être tué en Indochine. Quelques temps plus tard, après son retour, il me montra dans son cahier de texte deux photos, celle d’un Saint Cyrien en grand uniforme et celle d’un capitaine en tenue de combat. A ma

question, il répondit « Il était beau ! » Que peut répondre un gamin à une telle affirmation ?

Sur la gauche, un escalier caché permet d’accéder aux sous-sols où on trouvait les douches utilisées par les internes le samedi en soirée, la chaufferie, les ateliers du personnel d’entretien, les trois réfectoires, des professeurs, de la 1ere division et de la 2eme division où nous n’étions autorisés à parler qu’après le bénédicité. C’est pendant le repas de midi qu’on nous distribuait le courrier qui avait été ouvert et censuré par le supérieur. De même, lorsque nous écrivions à quelqu’un, la lettre devait être déposée ouverte dans une boite spéciale où le supérieur venait les chercher et lisait notre correspondance en la censurant éventuellement avant de la poster. Inutile de préciser qu’en dehors de la famille directe aucune autre lettre ne passait la censure. Heureusement nos camarades externes, pouvaient nous dépanner dans certains cas, mais il ne fallait pas se faire prendre, sous peine de renvoi. Au-delà des réfectoires, c’était les cuisines et réserves, royaume de Carmella, une « mama » italienne qui avait son franc parler. Son mari, Giovani aidait pour le service, mais comme nous l’avions vu dans la matinée ramasser les feuilles ou nettoyer à grand jet les cabinets dans la cour, nous nous demandions toujours s’il s’était lavé les mains. Madame Benistant et son mari participaient également au service.

En face de nous, le couloir des classes. Ce couloir emprunté journellement en rang par deux et en silence pour tous les mouvements de la journée. Devant chaque porte des ombres nous accueillent :

Le père AMOUROUX, professeur de philosophie qui logeait au second étage et avait un crane sur son bureau. Le père BEL, professeur de première, pince sans rire et qui tenait l’harmonium lors des fêtes carillonnées.

Le père JACOB, dit Chuchu, professeur de seconde, ancien combattant de la guerre de 14. Il avait été gazé à Verdun et souffrait de problèmes respiratoires. Parfois, l’hiver par grand froid, il faisait ses cours en sabots. L’élève Baluche lui posait toujours les questions que personne n’avait posé.

Le père FURST, dit Furzou, professeur de Physique Chimie, petit bossu avec sa canne, qui officiait dans son laboratoire. Un jour, pendant le Salve Regina vespéral, une détonation ébranla les murs et vitraux de la chapelle. Il en fallait plus que ça pour interrompre la prière du soir, mais lorsque nous sortîmes de la chapelle, nous vîmes au milieu du couloir Furzou, tout sourire, alors qu’une fumée grise s’échappait du labo fenêtres et portes ouvertes. Il riait en disant « Vous avez entendu ? ».

Le père VIAIN, professeur de mathématique et de physique en seconde et première, Jean Viain, JV, grand bonhomme maigre, rouennais d’origine qui n’avait pas son pareil pour nous raconter des histoires de la résistance.

Le père SIBOURG, professeur de quatrième, toujours bien coiffé et fumeur invétéré.

Le père MORETTI, professeur de cinquième, retour d’Indochine où il avait été torturé par les Viêt. Ses doigts jaunis par la nicotine, n’avaient presque plus d’ongles. Pendant les cours, il avait toujours une bonne excuse pour sortir fumer dans la cour.

Le père FISHER, toujours coiffé d’un béret, professeur d’allemand. Il sera remplacé par le père ELMER, dit le Muche, retour de Dachau. Lui aussi grand fumeur aux doigts jaunis de nicotine, qui sortait fumer pendant les cours. Il remplaça le père Siaud comme aumônier scout.

Le père FERRIER, professeur d’histoire-géographie qui débarqua au milieu des années 50. Il fut l’un des premiers à introduire de nouvelles méthodes dans ses cours : projection de films et diapositives, conférences par des élèves, voyages etc.

Au milieu de tout ce petit monde en soutanes, il y avait quelques laïcs.

Monsieur MAZORIC, dit « Mazo », professeur de MathElem, qui vous traitait de « coyon » lorsque vous aviez fait une erreur et si l’erreur était impardonnable, vous étiez un « extrait de coyon ».

Monsieur FOREST, professeur de mathématique en troisième, quatrième et cinquième. Retour d’Afrique, c’était un grand pédagogue qui n’avait pas son pareil pour rendre les choses simples.

Monsieur JACQUEMOND, professeur de sixième.

Mademoiselle AMOUROUX, professeur de dessin, qui surveillait ses neveux par la fenêtre de la classe et se précipitait toute affaire cessante pour rhabiller le petit dernier qui sortait des toilettes.

Monsieur JULIEN dit Juju, professeur d’éducation physique (à l’époque on disait prof de gym).

C’est dans ces années 50 que nous avons vu arriver plusieurs nouveaux professeurs qui deviendront des piliers de l’établissement : Monsieur SIMEONI, professeur d’Italien, qui nous faisait chanter « Santa Lucia » et autres chansons italiennes. Il adorait l’Italie et organisait des expositions sur les villes italiennes. Il deviendra chef d’établissement de l’IND. Monsieur MATHIEU professeur d’anglais qui deviendra directeur du collège, Monsieur CHAPELLE, professeur d’éducation physique, Monsieur GENOUD, professeur d’anglais.

Sur la gauche, l’escalier qui mène à l’étage de direction. En haut de l’escalier, une porte sur laquelle une étiquette en lettres gothiques indique « Monsieur le Supérieur » c’est le bureau occupé par le père DAVIN, grand maigre, assez timide, son titre lui donnait de l’autorité, il était capable de remplacer au pied levé n’importe quel professeur. Il sera remplacé par le père François LONG, dit Frelon beaucoup plus râblé, colérique et autoritaire, il avait déjà été supérieur de l’IND pendant la guerre.

En avançant dans le couloir, le bureau du « Préfet de Discipline » occupé par le père SNAKERS, dit le Snake, ancien missionnaire hollandais et professeur d’anglais. Il nous faisait apprendre le « Notre Père » et le « Je vous salue Marie » en anglais que nous récitions au début des cours d’anglais. Ses « boudiou » étaient célèbres. Son apparition au bout d’un couloir ramenait instantanément le calme et l’ordre. Il circulait en vélo qu’il garait dans le couloir en face de son bureau, un vélo de femme (soutane oblige) avec le guidon en bête à cornes. Certains élèves prenaient un malin plaisir à cacher le vélo. Une fois par an, il rentrait en Hollande pour voir sa famille. Pour le voyage il s’habillait en clergyman (costume noir et col romain) et ne manquait pas de se promener dans les couloirs et les cours, fier comme Artaban.

En face du vide de la chapelle, la salle des profs, puis le bureau de l’aumônier occupé par le Père SIAUD, également aumônier des scouts, balafré, brisé plusieurs fois suite à plusieurs accidents dont un lors d’une sortie scoute à Crussol où pendant un jeu de nuit on le releva avec une jambe cassée et une fracture du crâne. Il sera remplacé par le père ROCHE, originaire de Malissard.

En face de l’aumônier, le logement du chanoine QUIOT, ancien professeur de philosophie à la retraite. Ensuite, c’était l’infirmerie, où officiait Madame Bénistant. Plus loin, dans l’aile gauche le domaine des sœurs. Le petit collège (les classes primaires) était animé par des sœurs alsaciennes qui s’étaient réfugiées à Valence pendant la guerre. Sœur Augustine, Sœur Jeanne Antoine et sœur Françoise, assistées par Mademoiselle GUERIMAND pour la maternelle.

A droite de l’escalier, le bureau de « Monsieur l’Econome » occupé par le Père FEUGIER Veuf et vocation tardive, charpentier de métier il dirigeait avec brio l’équipe d’entretien. De temps à autre ses filles venaient le voir. Inutile de préciser les plaisanteries qui courraient sur les filles du curé.

En montant l’escalier jusqu’au 2eme étage, nous arrivions aux dortoirs, précédés du hall dans lequel des rangées de casiers à chaussures nous permettaient d’entrer dans les dortoirs en pantoufles. Ces dortoirs étaient quittés le matin à 6h30 fenêtres ouvertes et lits ouverts. Nous y remontions à midi pour faire nos lits et fermer les fenêtres. Ils n’étaient pas chauffés. Je me souviens de février 56 durant lequel il fit très froid (-15° à -20° pendant 3 semaines). Le matin au réveil, nos gants de toilette étaient gelés et très vite, seul le dortoir des terminales resta utilisable pour la toilette, tous les autres lavabos étaient inutilisables pour cause de gel. En face de l’escalier, le dortoir de la 2eme division, grand dortoir d’une centaine de lits qui occupait toute l’aile droite. Sur la gauche, le dortoir des terminales qui occupait un tiers du bâtiment central et à gauche au milieu du couloir le dortoir de la 1ere division, abritant une cinquantaine de lits qui occupait le reste de l’étage. Dans chaque dortoir, une ou deux rangées de lavabos (auge en zinc dans laquelle un certain nombre de jets coulaient pendant le temps de la toilette).

L’IND établissement moderne posséda un téléviseur dès qu’il fut possible d’en avoir un à Valence. Au début en salle des professeurs où nous venions voir certains évènements importants (obsèques de Pie XII, élection de Jean XXIII etc.) ensuite, un deuxième appareil fut installé dans une salle où les internes pouvaient aller le dimanche au lieu de la promenade en cas de mauvais temps. Cet appareil avait remplacé une statue de la vierge sur un socle aux armes de l’Institution.

François BOUYON.

Souvenirs de l’IND

Jacques RICHARD  Pensionnaire (1943 à 1951). Annuaire 1995 : Général de brigade Aérienne.

« Pensionnaire de l’IND, comme mes deux frères, pour moi depuis la 7ème à la Terminale, il ne me reste en mémoire que quelques brides de ces années après un coma de 5 mois dû à la chute d’un arbre que je traitais. Handicapé, je ne pourrai venir à vos réunions.

À l’époque de l’IND, pas question de revenir chez soi le weekend, c’était alors une marche en ligne sur deux rangs, en silence, jusqu’à la destination du dimanche, ou aux grottes de Mandrin, entre autre comme le raconte Pierre Vallernaud.

Je me souviens aussi que j’étais interdit de foot car mes parents n’avaient pas pu participer à l’achat du ballon, si rare à cette époque.

Et puis le retour chez moi à Livron en faisant du stop, non devant les voitures, rares à l’époque et les cars n’existaient pas, mais dans la gare de Valence où les chauffeurs de locomotives à vapeur préparaient leur loco avant le départ. Je montais alors dans le tender et étais chargé d’alimenter en charbon, avec une pelle, le feu de la loco. Le chauffeur arrêtait son train en pleine voie pour me permettre de descendre à 2 km de la ferme de mes parents.

Je me souviens aussi de notre maîtresse de Français, réfugiée d’Alsace je crois, avec son parler mi français mi alsacien.

Et puis la récréation pieds nus car on n’avait pas tous, et encore assez peu de chaussures, ou encore le pain jaune qui nous était donné le matin pour la journée entière.

Ou encore les visites au parloir quand parents ou grands-parents venaient, assez rarement, nous voir. C’est dans ce parloir que j’ai connu pour la première fois mon Père, (Alban Richard). Il était revenu de la guerre contre le Japon après Hiroshima, bien après la fin de la guerre avec l’Allemagne. Il était parti comme militaire en Afrique vers 1936 ou 1937 et nous avions été sans nouvelles de lui pendant des années.

Je crois aussi me souvenir aussi du grand dortoir qui occupait tout le haut de Notre Dame. Nous y étions tous ensemble de la 7ème à la Terminale, et la toilette du matin devant les rangs de robinets sur l’unique écoulement, où nous devions faire la queue, puis descendre en silence , toujours en rang par deux vers la chapelle.

Mais c’est grâce à cette éducation et instruction, de Notre Dame et de nos parents, un peu dure, que nous avons pu, avec notre travail, modifier grandement  les conditions de vie en France de nos enfants et petits-enfants. Alors qu’à l’époque les fermes n’avaient ni eau courante, ni électricité.

Merci à Notre Dame et à ses enseignants.

A tous ceux qui liront ces souvenirs que ma devise « Faire Face », (à toutes les difficultés)  continue à animer la génération actuelle, comme l’ancienne. ».

Jacques RICHARD

Voyage en Italie : 1 000km en vélo

AOUT 1957 près de 1000 Km en vélo

Voyage en Italie organisé par le père Robert Ferrier Professeur d’histoire-géo

Liste des participants : Père Robert FERRIER (organisateur) - François BOUYON - Bernard CHEVALIER -Gilles COSTAZ - Pierre COSTAZ - Henri LESAGE - Jean-Bernard MOTOL - Jean MOURIER - Alain PERAQUE - Jean-Pierre TOULZE - Jacques PERRIER (séminariste accompagnateur).

Il faut imaginer l’Italie en 1957. Pratiquement pas d’autoroutes (de toute façon nous ne les empruntions pas), on circule sur le tracé des voies romaines, élargi et goudronné, dans certains endroits une nouvelle chaussée moderne a été construite juste à coté de la voie romaine. Encore peu de déviation, on traverse villes et villages. Au bord des routes, d’immenses panneaux publicitaires ce qui est encore rare en France (Gelati MOTTA ou ALLEMAGNA, AQUA PENDENTE, SAN PELEGRINO etc.) Notre caravane s’étire normalement sur presque un kilomètre et parfois beaucoup plus. Les vélos de l’époque sont en bon acier et pèsent très lourds avec en plus les sacoches contenant nos vêtements et effets personnels plus le duvet sur le porte bagage. Seuls quelques uns d’entre nous ont des vélos récents avec double plateau la majorité des participants n’ont que trois vitesses.

Le Père Ferrier pédale en short comme tout le monde, mais à l’approche de l’étape, arrêt obligatoire pour repasser la soutane. Nous sommes quand même en Italie et cela facilite grandement les contacts pour trouver un logement, car rien n’est retenu à l’avance sauf à Rome où une lettre a annoncé notre arrivée pour le 15 aout. De même le matin, le père part en soutane jusqu’à la sortie de la ville. A la fin du voyage, le dos de la soutane est blanchi par la transpiration.

En général, nous partions après la messe et un solide petit déjeuner (souvent pris dans une Lataria) et pédalions jusqu’au repas de midi, composé la plupart du temps de tomates au sel, d’anchois, de charcuterie, de pain et de fruits achetés dans un des villages traversés ou au bord de la route. Après le repas, repos fonction de la température et de la longueur de l’étape. Vers 15 h, 15h30 départ vers la ville étape atteinte aux environs de 18h. Le soir repas au restaurant sauf cas exceptionnel.

A Florence et à Rome, les déplacements se font en vélo. Je revois nos vélos, solidement reliés entre eux par les antivols, autour d’un pilier de la colonnade du Bernin.

Nous venons d’arriver à Rome. Le père Ferrier et Jacques Perrier sont partis reconnaitre le collège Mariste où nous devons loger. Nous les attendons en terrasse d’un petit café aux pieds des remparts de Rome, Porte Pia. Le propriétaire du café a sorti son petit singe (sur la table) en notre honneur.

De gauche à droite :

Assis sur le trottoir : Pierre COSTAZ et Alain PERAQUE

Sur les chaises :

1er rang : François BOUYON, Jean MOURIER et Jean-Pierre TOULZE (de profil)

2eme rang : Henri LESAGE et Bernard CHEVALIER (chapeau)

Gilles COSTAZ et Jean Bernard MOTOL doivent être derrière l’objectif.

Retranscription de mon carnet de route retrouvé récemment. Je n’y ai rien changé.

 

6 Août 1957 : VALENCE – PISE

03h34 : Départ de la gare de Valence, arrêt à Romans, puis Grenoble et Chambéry.

06h25 : Arrivée à Chambéry. Nous profitons de l’heure d’arrêt pour déjeuner au buffet de la gare.

07h30 : Départ dans le Paris-Rome. Nous avons un compartiment réservé, mais des gens ont pris nos places. Heureusement, une colonie de vacance vient de libérer plusieurs compartiments et le contrôleur nous en donne un. Puis nous arrivons à Modane, vérification des passeports et en route pour l’Italie.

12 h00 : Turin, premier contact avec les italiens pour trouver de l’eau.

12h30 : Départ vers Gènes et Pise. Nous dormons un peu. Ensuite, il y a une succession de tunnels et le temps brumeux nous empêche de voir la mer.

18h30 : Arrivée à Pise. Nous nous renseignons chez un curé pour savoir où coucher. Pendant que le père cherche un logement, nous allons tous à la tour et nous nous étendons dans l’herbe.

Enfin, on nous accepte dans une maison de jeunes gens, toute en marbre avec l’eau courante (sic).

 

7 Août : PISE – EMPOLI (41 Km)

Après un rapide petit déjeuner, nous visitons PISE : la Tour penchée, la Cathédrale, le Baptistère et le Campo Santo. En fin de matinée, nous allons récupérer les vélos à la gare. Ils sont tous là et en bon état. Premiers coups de pédales dans les rues de Pise pour aller charger nos sacoches et départ pour EMPOLI.

Nous nous arrêtons pour acheter des provisions dans un petit village. Immédiatement les gens nous entourent et les questions pleuvent : Di dove vienne ? Dove andate ? Etc. etc. Nos vélos sont examinés sous toutes les coutures, en particulier les vélos récents. Nous mangeons à la sortie du village. Peut après le repas, la première crevaison arrive à Jean MOURIER. Le soir enfin, nous arrivons à EMPOLI. Nous allons coucher au grand séminaire où nous sommes reçus par un père qui ressemble au père Martin physiquement et par les gestes. Il nous emmène au café et nous offre à boire. Dans notre logement, nous avons 3 baby-foot rien que pour nous.

Nous allons diner au restaurant et nous couchons.

 

8 Août : EMPOLI – FLORENCE (33 Km)

Le matin, messe dans la cathédrale d’EMPOLI, puis visite gratis du musée du grand séminaire. Enfin, nous partons accompagnés par un abbé qui nous quitte en route. Nous longeons l’Arno pendant une dizaine de kilomètres et arrivons à FLORENCE peu de temps après. Nous allons pique-niquer dans le parc de Cascine. Le père Ferrier nous quitte vers 15 heures pour chercher où coucher. Il revient vers 19 heures en nous annonçant qu’il n’y a que l’auberge de la jeunesse mais qu’elle coute 300 lires par nuit. Comme il fait beau, nous décidons de coucher à la belle étoile dans le parc de Cascine.

Mais le père Ferrier a repéré une petite église non loin de là et va frapper à la cure où il est très bien accueilli et on lui indique un local paroissial qui pourra nous servir d’abri. Cette église s’appelle « Santa Maria Alpinione ». Nous mangeons à Cascine et nous partons dormir dans la salle de jeu paroissiale.

 

9 et 10 Août : FLORENCE

Nous visitons Florence, Il Duomo, le Baptistère, les Offices, le Pallazzo Vecchio, Le Ponte Vecchio etc. A midi, pique-nique à Cascine, le soir diner au restaurant.

 

11 Août : FLORENCE – AREZZO (88 Km)

Cette étape est la plus longue prévue. Nous quittons FLORENCE le matin vers 8h30 après la messe. Pour éviter la boucle de l’Arno, nous prenons un raccourci par les collines. Il y a beaucoup de cotes, mais heureusement des descentes aussi. Enfin après beaucoup d’efforts nous retrouvons la vallée de l’Arno à INCISA in Val d’Arno. Après un bref repos, nous repartons. A SAN GIOVANI Val d’Arno nous nous arrêtons pour manger et nous baignons dans l’Arno. Nous repartons, mais à 2 Km nous nous arrêtons à l’ombre des pins, il fait trop chaud pour continuer, la sieste s’impose. Nous repartons vers 16 heures. A 19h30, nous entrons dans AREZZO. Le père Ferrier part chercher un logement qu’il trouve dans une salle de jeu paroissiale. Nous dinons au restaurant et nous couchons.

 

12 Août : AREZZO – SAN GIOVANI (91 Km)

07h30 : Lever. Nous allons dans une « Lattaria » pour déjeuner. Puis nous visitons AREZZO.

09h30 : Départ d’AREZZO. Je m’arrête chez un mécanicien pour acheter un boulon que j’ai perdu sur mon vélo. Nous roulons jusqu’au Lac Trasimène au bord duquel nous pique-niquons. Nous repartons vers 16 heures et après quelques arrêts nous arrivons à PEROUGE où est prévue l’étape.

Tout le monde veut aller à Assise ce soir. Mais à cause de la fatigue, nous soupons au restaurant à SAN GIOVANI. Puis nous allons coucher à la belle étoile près d’un pont sur le Tibre.

 

 

13 Août : SAN GIOVANI – ASSISE (15 Km)

06h00 : Lever. Nous nous lavons dans le Tibre.

07h30 : Départ

09h45 : Arrivée à ASSISE après quelques arrêts. Nous avons perdu Jean-Pierre TOULZE. Il trainait et s’est trompé de route. Enfin nous le retrouvons à Assise. Nous logeons au monastère des Clarisses.

Nous avons la messe, puis partons visiter l’église Saint François. Nous mangeons dans le jardin des sœurs, c’est là que nous coucherons.

Après la sieste, nous partons vers 16 heures visiter la maison de Saint François, ensuite nous allons à l’église Sainte Claire et descendons à San Damiano. Le soir, nous mangeons à l’auberge des sœurs et allons nous coucher à la belle étoile dans le jardin du couvent qui domine la plaine d’Ombrie.

 

14 Août : ASSISE – OTRICOLLI (100 Km)

Départ d’ASSISE vers 07h30 après la messe et le petit déjeuner abondant.  Nous descendons d’Assise et rejoignons la Via Flaminia à FOLIGNO et nous roulons jusqu'à la source de Clitulme. Après un arrêt repos, nous repartons. Comme nous arrivons à SPOLETE, le vent de face se lève. C’est une difficulté de plus pour grimper le « Passo della Somma » (695 m). Enfin tout le monde se retrouve au sommet où un arrêt réparateur nous permet de reprendre des forces. Ensuite, nous attaquons la descente vers TERNI.  Nous nous arrêtons dans un village pour acheter des provisions. Des gens nous entourent et nous offrent des gâteaux. Nous mangeons peu après au bord de la route. Aux environs de NARNI, nous nous lavons, puis nous repartons. Nous ne coucherons pas à NARNI comme prévu, car il est 16 h. Nous continuons donc à pédaler sur la via Flaminia et nous arrêtons à Bivio pour manger. Nous avons retrouvé le Tibre et couchons à la belle étoile non loin d’OTRICOLLI.

 

15 Août : OTRICOLLI – ROME (50 Km)

Le père Ferrier dit la messe dans un village peu après le départ du campement, puis nous repartons. A midi, comme tout est fermé, nous allons au restaurant, ensuite, nous nous reposons pendant les grosses chaleurs et en profitons pour réparer et entretenir nos vélos.

Puis nous repartons. Nous pénétrons dans ROME par la via Flaminia. A Rome, nous allons chez les Maristes. C’est un collège tout neuf encore en travaux, situé via Nomentana. Nous logeons dans une salle de classe qui nous servira de dortoir pendant notre séjour. Lavabos et douche sont au bout du couloir.

 

16 Août : ROME

Le matin : visite du Vatican, l’après-midi : Forum, Palatin et Colisée.

 

17 Août : ROME

Le matin : Catacombe St Calixte avec messe dans les Catacombes, St Paul Hors les Murs et Thermes de Caracalla, l’après-midi : Art baroque, Fontaine de Trevi, Panthéon, St Louis de France.

 

18 Août : ROME

Ste Marie Majeure, St Jean de Latran, la gare Termini, le jardin des Médicis et la villa Borghese.

Pendant tout notre séjour, nous mangeons dans les E.C.A., restaurants populaires où l’on mange les « pasta asciuta » en bon français spaghetti bolognaise pour un prix défiant toute concurrence.

 

19 Août : ROME – CIVITAVECCHIA (71 Km)

Nous quittons ROME le matin par la via Aurelia et pédalons jusqu’à LADISPOLI où nous nous arrêtons pour manger et nous baigner. Vers 17 heures, nous nous arrêtons à SANTA MARINELLA où nous attrapons un grain. Nous repartons et avant d’arriver à CIVITAVECCHIA, nous nous abritons sous un pin, car il repleut. Enfin, nous arrivons à Civitavecchia où le père nous trouve une salle paroissiale pour dormir.

 

20 Août : CIVITAVECCHIA – VITERBE (68 Km)

Après un bref déjeuner, départ par la via Aurelia que nous quittons à TARQUINIA où nous visitons les tombeaux étrusques. Nous mangeons à MONTE ROMANO. Comme nous venions de repartir, deux crevaisons. Un peu plus loin arrêt, Bernard CHEVALIER a cassé son pédalier, il faut le mener chez un mécanicien pour réparation. Enfin nous repartons et à VETRALLA nous rejoignons la via Cassia. Arrivé à VITERBE nous logeons dans un collège de Maristes que ceux de Rome avaient prévenus de notre arrivée.

Le réfectoire nous attend avec un solide repas, puis nous allons dans la salle de TV où nous pouvons voir le journal télévisé (en italien) avec les pères maristes. Ensuite, on nous emmène au dortoir où des lits avec des draps sont faits et nous attendent.

 

21 Août : VITERBE – ORVIETO (46 Km)

Après une bonne nuit et une rapide visite de VITERBE, nous repartons sur la via Cassia. Nous mangeons à MONTEFIASCONE où nous quittons la via Cassia en direction d’ORVIETO. Le soir nous couchons dans une chapelle désaffectée.

 

22 Août : ORVIETO – MONTEPULCIANO (70 Km)

Après la messe matinale, départ vers MONTEPULCIANO. Après une bonne cote nous redescendons. Nous nous arrêtons pour manger. Le soir à MONTEPULCIANO, nous rencontrons des américains qui nous offrent à boire. Puis nous allons dormir.

 

23 Août : MONTEPULCIANO – SIENNE (64 Km)

Le matin, après une rapide visite de MONTEPULCIANO, nous partons sur une belle petite route. Ensuite, nous rejoignons la via Cassia. Nous nous arrêtons pour manger au pied de la « Rampe de Celamonti ». Après un arrêt de 2 heures, nous repartons. Le soir, nous arrivons à SIENNE sous un ciel gris. Nous logeons dans un collège des Frères de Saint Vincent de Paul.

 

24 Août : SIENNE

Nous visitons Sienne : la cathédrale, la maison de Ste Catherine, la Pinacothéque, la Piazza del Palio, le Palazzo Communale etc.

 

25 Août : SIENNE – SAN GIMINIANO (42 Km)

Le matin, nous quittons SIENNE après la messe. De SIENNE à POGGIBONSI, nous suivons la via Cassia qui est très ombragée. A POGGIBONSI, nous achetons de quoi manger, puis nous nous arrêtons au bord d’une rivière où nous nous baignons. Vers 15 heures, nous repartons. La route suit une vallée, mais ça monte dur avant d’arriver à SAN GIMINIANO. Ce soir, nous couchons dans un théatre.

 

26 Août : SAN GIMINIANO – CECINA (59 Km)

Ce matin, peu après le départ de SAN GIMINIANO nous quittons la route goudronnée pour aller à VOLTERRA par une route empierrée. Elle monte beaucoup. Enfin après une crevaison de Jacques Perrier, nous arrivons et mangeons à VOLTERRA. Dans l’après- midi, en bas de la descente, Alain casse son porte-bagages. Je transforme mon vélo en camion, car je prends ses sacoches sur mon porte bagage avant. Peu après, nous arrivons dans une belle pinède en bord de mer aux environ de CECINA MARINA où nous dormirons à la belle étoile.

 

27 Août : CECINA – PISE (65 Km)

Au matin, nous quittons CECINA après un bon bain. Nous avons retrouvé la via Aurelia. Nous allons jusqu’à VADA où le père célèbre la messe. Ensuite, petit déjeuner pendant que le père se rend au presbytère. Puis en route pour PISE. A MARINA DI PISA, nous nous baignons. Arrivée à PISE vers 16 heures. Nous allons loger au Séminaire où l’on nous donne la salle de gymnastique, car les dortoirs sont occupés par la JOCF. Après avoir déchargé les sacoches, nous allons à la gare pour expédier les vélos. Le soir, promenade nocturne devant la « Torre Pendente ».

 

28 Août : PISE – VALENCE

8 heures : départ de PISE après le petit déjeuner. Nous jouons aux cartes. A GENES, nous ne pouvons pas aller chercher du pain, car l’arrêt d’une heure prévu par l’horaire ne dure en fait qu’un quart d’heure. A TURIN nous pouvons en acheter. Nous mangeons puis je vais dans le couloir admirer les Alpes.

17 heures : arrivée à MODANE, nous revoici en France, contrôle des passeports.

21 heures : arrivée à CHAMBERY. Nous traversons la gare en coup de vent pour attraper la correspondance. Dans notre compartiment réservé, deux espagnoles se sont installées. Enfin nous arrivons à tous nous caser. Nous mangeons.

23 heures : arrivée à VALENCE. Le père me fait coucher à St Apo. Je ne rentrerais à la maison que le lendemain.